jeudi 13 mars 2014

Ma mère

J'ai trop souvent oublié ma mère. En même temps, comme pour tous ceux autour de moi, je ne voulais pas la déranger. Elle a assez donné pour nous élever et nous protéger, je n'ai plus à lui parler de mes problèmes. Je suis un homme après tout, on me dit que je dois prendre sur moi.

Mes souvenirs les plus lointains me ramènent toujours à l'amour. Même si j'ai encore cette impression que je ne la voyais pas souvent, je sais qu'elle est toujours plus près que je le pense. Mes deux parents travaillaient fort quand j'étais petit. Mon frère Jonathan est arrivé vite pour me tenir compagnie et pour voir lui aussi qu'on était bien chez nous. Parce que maman et papa travaillaient, mais, avant tout, ils nous aimaient.

J'ai vieilli et le clan à grandi. Keven, Mathieu, Cathy et Hugo n'étaient pas des bouches de plus à nourrir, juste de nouvelles raisons d'aimer. Même si on s'engueulait, criait ou se battait...la base de tout ça c'est qu'on s'aimait. Ma mère ne nous a jamais fait sentir qu'ont était des fardeaux pour elle, même si on n’était pas une gang facile. On aidait pas beaucoup dans la maison, on prenait de la place pis on se la fermait pas. Malgré tout, maman nous faisait les plus beaux colleux du monde et elle continuait sa journée. Si certaines personnes trouvent qu'avoir un enfant c'est du sport, imaginez 6 ti-criss qui n’arrêtent pas.

À un moment donné, ça été plus difficile. Mathieu est parti à cause de l'hiver pis cette énergie contagieuse qu'on avait tous. Ça été très difficile pour mes parents. Les semaines et les mois ont passé pis finalement ils se sont séparés. L'aîné que je suis venait de frapper un mur. J'ai essayé de m'occuper de mes frères et de ma sœur pour que tout le monde puisse passer à travers. À cette époque-là, j'ai vraiment essayé d'oublier ma mère. Je lui en ai voulu longtemps parce que j'avais trop d'affaires sur le dos en même temps : l'école secondaire et ses effets, le deuil de mon frère, les problèmes d'un p'tit gars qui s'aime pas et cette séparation. Je savais au fond de moi que je ne pouvais pas en vouloir à ma mère, la vie est comme ça. Mais ça a quand même pris du temps avant que je puisse revoir ma mère comme étant ma mère. 

J'ai fini par partir en appartement, on se voyait encore moins souvent. Les études, les chums, la boisson, les filles...trop de chose qui ont fait que j'ai encore oublié ma mère. Mais elle ne m’oubliait pas : une batch de sauce à spaghetti, un peu de sous à l'occasion pour l'épicerie, des invitations nombreuses à souper, des appels, etc. Je refusais au début, mais je finissais toujours par lui dire merci. 

Ma mère a eu peur pour moi. Les gros party, les peines d'amour, l'incertitude professionnelle...des trucs que j'aurais dû porter tout seul, mais ma mère avait juste besoin de me dire : "inquiète-toi pas, ça va passer" ou "c'est la vie" pis je voyais déjà moins noir. Ma mère était fière de moi. Du théâtre au primaire, au secondaire et au cégep. Elle ne m’a jamais dit que je perdais mon temps : elle a cru en moi, en mon talent et ça c'est le plus beau des cadeaux. C'est, entre autres, à cause d'elle que je suis devenu et resté un artiste. 

À 30 ans, j'essaie de ne plus oublier ma mère. Il y a la distance qui n’aide pas, mais j'essaye. Elle lit mes textes, on s'appelle pas souvent, elle vient ici, je vais là-bas. Mais je pense toujours à ce qu'elle me dirait si elle était là. À chaque fille que je rencontre, je me demande si ma mère l'aimerait, pas que l'approbation de ma mère soit obligatoire, mais ça me fait rire de l'imaginer. Je me demande quel genre de conseil elle pourrait me donner dans ma vie quand ça va pas, aux réactions qu'elle aurait face à mes gaffes et autres niaiseries.

Je sais ceci : ma mère m'aime. Que je sois vulgaire, imbécile, farceur, en criss, absent ou ingrat, ma mère ne changera pas. Elle restera toujours ma mère.

Je t'aime maman. Même si tu as l'impression que ton grand garçon t'oublie, sache qu'il est bien triste de se rendre compte que c'est arrivé si souvent. 

À la mère que je ne mérite pas : je t'aime.

Michael.

dimanche 2 mars 2014

Sans arrêt

C'est impossible pour moi d'être serein. Ma tête n'est jamais vide. Les petits bonheurs ce sont enfuies un soir d'avril trop dur à encaisser. Depuis, la tristesse a disparu, mais elle a quand même laissé quelque chose derrière elle. Le doute est, ironiquement, la seule certitude dans ma vie.

Toutes les secondes s'arrêtent afin de participer à cet état qui finira par me rendre fou. Endurer ces questions qui tournent sans relâche dans mon esprit, c'est jouer avec le feu. Si on ajoute ma solitude, je ne suis jamais à l'abri de l’insupportable, de la peur et de cette panique soudaine qui me lient à l'incertitude quotidienne. 

C'est quand j'ai besoin d'être seul que tous sont là à occuper ma vie et mes pensées qui elles m'oublient pour une fois. Mais lorsque l'angoisse me gifle et m'insulte, je suis toujours seul à tenter de recevoir les coups comme il le faut. Parce qu'ils le disent tous : il faut être fort, solide et lever la tête. Mais quand ta tête te t'appartient plus, qu'est-ce que tu fais ?

Si les mots guérissaient, il y a longtemps que je serais debout. Mais c'est de plus dont j'ai besoin. De bras où je pourrais véritablement me reposer, d'une épaule sur laquelle poser ma cervelle enflée et de mains pour essuyer des larmes qui ne cessent jamais de couler. Le plus difficile n'est pas de vivre toutes ces nuits; c'est de penser à comment elles vont se terminer et de continuer à espérer.