mardi 20 août 2013

Un soir d’alambic et de fausses promesses

C’était un soir d’alambic et de fausses promesses, l’ivresse s’alliait à la chaleur pour me souffler des mots libres et des images que j’avais moi-même dessinées. Je ne sais pas pourquoi je suis si bien dans cet état oscillant entre paix et violence. Chaque gorgée me redonne la force qu’il me faut pour faire un pas de plus, discourir encore quelques minutes, me rappeler pour quelles raisons je suis malheureux. L’amertume éveille mes sens;  je songe à ceux qui gagnent leurs vies en nous enivrant. Je me suis toujours demandé s’ils sont conscients du bien qu’ils me font lorsqu’ils me permettent de prendre un autre verre.

Avant d’échanger avec la bouteille, ce sont des promesses qui sont venues discuter avec moi. Certaines provenaient de mon imagination, d’autres de signes que je n’ai su voir et, finalement, il y avait ces promesses que je m’étais faite. J’aurais dû fuir : je devais apprendre à vivre avec la tristesse des soirs râleurs et des nuits solitaires. Malgré tout, j’y plonge. Parfois, c’est en cuvant mon vin que je revois le mieux comment je suis arrivé ici. C’est avec force que j’ai suivi ma route, mais avec regret. Il m’est difficile de vivre maintenant. Avec les attentes des uns et les souvenirs d’autres, je ne pourrai plus jamais être comme je le voudrais.

J’y songe lors de ces soirées où tous perdent le contrôle.  Le passé parle de nouveau ma langue sous les étoiles. C’est de nostalgie que se construisent nos fêtes. C’est au goulot que l’on attend le regard amoureux, l’oreille attentive ou cette main qui se mettra, elle aussi, à parler. Entre les verres se succèdent des mots vrais que je retenais, des respirations franches, le courage d’espérer et les cœurs exilés. À force de boire, on tente de trouver le fond. Même assis par terre, il est toujours possible de tomber.

C’est se libérer que de consentir à étancher notre soif. Les plus belles de nos promesses sont celles qui nous furent inspirées par des pénombres aussi sincères. Même si personne ne parle, tout le monde comprend la suite. Que ce soit la bière du soir, le vin des repas ou les liqueurs des discussions; la mélancolie franchira toujours le pas sans y être invitée.

C’est seul que tout se manifeste. C’est à cet instant que je constate que ma plume, ma tristesse, mon imagination, les enivrants et les mots me permettent chaque jour de vivre mon chef-d’œuvre.

Lorsque viennent enfin les soirs d’alambic et de fausses promesses, j’arrête enfin de rêver.

samedi 10 août 2013

Ceux qui restent

Ce sont des larmes qui se sont mises à parler. Comme si tout devait se terminer, il se laissant aller vers la mémoire des autres. Le plus jeune de ses espoirs s'était, lui aussi, enfui. Certains disent que c'est le mal qui l'avait usé, mais tous se refusèrent à lui dire au revoir. 

Son verre était vide, la gorge toujours nouée par l'improbable et les refus de mettre un terme à cette comédie. Il y a bien longtemps que personne n'avait ri, qu'on s'était lassé des vérités et de cette chaleur qu'il osait offrir à ceux qu'il aimait. C'est lors d'un dernier soir de solitude qu'il s'était mis à chanter. Les mots se chargeaient de le conduire dans la pénombre, les rythmes soutenaient son cœur et les notes se battaient entre elles pour finir sur ses lèvres. Que du vent qui usurpe et attise. 

C'est dans un fauteuil plus âgé que lui qu'il inspira une dernière fois; en attendant les remords du monde et la douce caresse de l'acceptation. Cela n'a jamais été une question de nostalgie apprivoisée ou de masochisme consommé, mais bien une question que son simple esprit retrouvait chaque nuit.

C'est un jour de colère qui le découvrit au repos près de son verre et de flammes presque éteintes. Ses yeux restèrent aux aguets, prêts à saluer les premiers curieux malgré l'absence de leur maître. La bouche close, il nous dévoilait la fin de ses discours et des chants sincères. La fin de cette éloquente chute allait libérer un entourage indifférent.

Il fût mené à l'abri des chagrins artificiels et intéressés pour qu'un dernier souffle soit entendu. Seul devant la glace, il entonna la plus vraie des poésies. C'est un cadavre, depuis longtemps dépouille, qui célébra son passage vers l'acte déjà moribond. 

Ceux qui restent se mirent à converser, à leur tour, avec un chagrin polyglotte et des larmes aux charmes de divas.

C'est toujours ceux qui restent que l'on entend se plaindre de départs souhaités.


vendredi 9 août 2013

Si

Si tu pouvais seulement comprendre pourquoi mes blessures sont bien comme elles sont.
Si tu savais à quel point tes mots sont tout.
Si nos chemins pouvaient enfin se quitter.
Si je pouvais être maître et non esclave.
Si je tombais sans m'en soucier.
Si les possibilités s'effaçaient.
Si les saisons s'accordaient pour nous donner tout notre temps.
Si la tristesse venait te trouver à mon départ.
Si le sommeil pouvait être autre chose qu'une hantise, qu'une vérité que je veux étouffer...tuer.
Si mon souffle discutait avec mes féroces instincts.
Si la douceur pouvait finalement apparaître après des violences qui me rappellent le sang versé.
Si l'excès finissait par se manifester.
Si je devenais mes peurs, mes rages, mes obsessions.
Si je pouvais me calmer.
Si j'étais virtuose.
Si j'étais vengeur.
Si je pouvais vivre sans mon coeur.

Je serais un monstre...rien qu'une nuit , le temps de tout effacer et me faire mentir.