dimanche 29 décembre 2013

Mort d'hiver

Aux morts d'hiver qui sont trop courtes et plus tragiques s'allient l'agonie d'un corps expiant sans remord.

Plus douce que le rêve d'antan, la solitude veut se faire entendre avant que le soir tombe, avant que l'on puisse la chasser.

Verre à la main, c'est le doute qui s'invite à ta table pour te faire comprendre que tu n'es rien sans les autres. Tu mourras bien assez tôt, parce que tu n'es pas patient.

Aux registres des ombres s'inscrivent les franches amertumes qui aboient dès que tu les dissimules. Nul besoin de savoir lire pour déchiffrer sang et larmes mêlées à la neige sentinelle.

Il fallait être naïf pour penser que tout se terminerait calmement. Ton coeur battait beaucoup trop fort pour que tu puisses rencontrer une si conciliante mort.

C'est ton lit vide qui se transformait en prison, car tu la croyais tout près, réelle. Mais le matin te crachait à la gueule dès le réveille pour te rappeler sans retenue que tu es seul.

Le dernier droit approche quand la peur se mêle aux souffrances et possibilités imaginées. Même si tous te disent que cela ne peut s'arrêter, tu as déjà décidé où aller.

L'attente expire lorsque tu oses lui dire que tout se termine. Quand s'achèvent tes jours, elle pourra enfin profiter de ses nuits.  

lundi 23 décembre 2013

Sans filet

Un autre soir sans autre chose
Des rivières rouges si jamais j'ose
Même si l'hiver chante si bien
Ma poésie ne mène jamais à rien

Une autre nuit qui m'oublie
Même si je hurle, même si j'expie
Au carrefour nulle n'apparaît
Ils oublient tous qu'ils me connaissaient

Je n'aurais jamais pensé
Être si facilement supplicié
Avec ou sans la bouteille
Que je boive de l'eau seule ou mêlée au méteil

Tranquille à tenter de comprendre
Seul, en chantant tout bas sans esclandre
Je me suis perdu sans penser chercher
Autre chose qu'une effluve torchée

Comme plus haut je disais
Je n'aurais jamais pensé
Que chaque jour j'allais pleurer
Mais plutôt que je me laisserais tomber, hélas, sans filet 

vendredi 6 décembre 2013

Même si je dors

Malheureusement, je me suis réveillé.

Rien de bien grave, parce qu'au fond je peux aussi te voir le jour.

Rien de bien grave, puisque tu ne te doutes de rien. Je suis le seul à essayer de vivre un désir trop clair.

Rien de bien grave, car je saurai m'effacer. Pour éviter de souffrir, mais aussi pour ne pas m'imposer comme le rêveur qui oublie trop souvent que ses songes ne sont que les siens.

Rien de bien grave, parce que je suis patient. Pour t'attendre, mais aussi pour trouver le courage qui me manque quand tu t'annonces. Quand j'écris, c'est de ce courage dont j'ai besoin pour mettre en mots cette faiblesse qui me prend à ta rencontre.

Tout change les soirs d'hiver, car la fête est plus loin. Elle se cache pour qu'on ne puisse s'y parler. Plus librement que sur la rue, plus timidement que dans ces songes dans lesquels tout est suspendu.

Sans attentes, je retourne dormir, car je sais que malgré tout, tu seras là demain.

lundi 2 décembre 2013

Danse avec l'inexplorée (2) : le parfum du regret

Ils ne faisaient pas l'amour pour la première fois. C'est chaque nuit qu'ils pensaient à l'autre au moment de sombrer quelques heures dans ce qu'ils ne pouvaient contrôler. Dans l'attente, ce silence devenu mélodie l'empêchait d'oublier ce qu'elle lui avait inspiré.

Le simple fait de l'inviter transformait ses nuits en dédale où se mariaient célérité et déraison. Que des mirages se charmant le temps d'une danse trop froide pour lui. Même si la curiosité le pousse à vouloir emprisonner un désir trop fort pour qu'il soit réel, il tentera tout de même de lui parler pour se consoler. Il veut aussi comprendre, mais dans ces cas-là, vaut mieux rester amant d'un songe que le prisonnier des attentes. 

Plus impétueuse que le manque, elle sourit au pauvre type qui s'efface par peur de décevoir. Il continue tout de même de suivre ces pas dans la foule. Des pas discutant de cadences trop lentes et de mélodies trop tristes. Il verra bien qu'elle est autre chose qu'un rêve : l'inexplorée avec qui il ne pourra danser.

La musique ne semble pas se taire malgré l'heure matrone entraînant les autres vers le sommeil. Il n'y a qu'elle et lui continuant à entendre le violon caresser, le piano pointer et le vent guider des pas réclamant plus de temps.

Il a tout de même peur. Pour lui, mais surtout pour elle : même s'il aime danser, il ne veut pas la décevoir. Il ne veut pas ruiner une danse, encore une fois, parfaite.

Au fond, il sait que la danse se terminera bientôt, mais il reste tout de même assis pour ne pas gâcher la finale.

vendredi 15 novembre 2013

La leçon

Tsé la fois où tu t'es ouvert le bras, y'avait juste trop de monde qui regardait. Tu le sais vraiment pas, tu sais pas ce qui aurait pu se passer si les gens avaient continué à t'oublier.

Encore, tout à recommencer un soir, trop tard. Tu as pensé cacher des marques qui finissent par s'effacer : t'avais peur pis c'est encore ça qui te tient.

À chaque fois que tu crois la fin venir, y'a bin d'autres choses qui t'empêchent de plonger. Les soirs d'été qui ne commence jamais ou les nuits d'hiver qui te vont si bien.

Même sans rien tu trouves quelque chose de trop pour t'empêcher de fuir et même tout ce qu'il faut pour bien dormir. Malgré un bonheur imparfait, tu cours trop vite pour le laisser te parler.

T'aurais dû prendre sa place, t'aurais dû y dire...t'aurais vraiment dû partir.

Y'a l'autre aussi pour qui t'a envie de te battre, va tu finir par le faire ? Va donc la voir.
Finalement, reste dont chez vous...c'est mieux pour tout le monde.

jeudi 7 novembre 2013

Toujours cruel (l'amour)

Avant, quand il existe seulement en toi. Peut-être est-il réciproque : elle te regarde aussi, mais fuit ton regard quand tu croises le sien. Finalement, elle et toi pensez à autre chose parce que vous êtes des aveugles qui n’osez pas vous approcher. L’amour est cruel quand tu décides de la regarder dans les yeux et à lui dire que sa beauté te trouble, que son souffle d’enivre et qu’elle est la seule qui trouble ton sommeil. Cette confusion c’est ta garde qui tombe et ton cœur qui tente de s’harmoniser avec le sien. Mais la cruauté te frappe lorsque tu réalises que tu as imaginé ces regards et ce désir que tu lisais sur son corps. À ce moment précis, tu souffres, tu restes aveugle et tu sais que ce mensonge, que tu as toi-même construit, te hantera encore longtemps. L’amour est plus cruel lorsqu’il est imaginaire.

Pendant que tu le vis à deux, cet amour restera cruel. Tu l’aimes comme tu n’as jamais aimé. Rien au monde ne te rend plus heureux, donc, ne pourrait te faire plus mal. Mais il faut tout de même en profiter pendant qu’il est là. Se refuser au bonheur en attendant mieux ou parce que l’on a peur de souffrir, c’est accepter de s’automutiler. Quand sa peau si douce frôle la tienne, quand ses mots sont pour toi, quand son désir parfume l’air ambiant : donne-toi ! N’attends pas, rends-la heureuse et sois heureux le temps que tu peux. Vous vous déchirerez bien assez tôt. Vous vous aimez tellement que vous avez mal : cette douleur de ne pas pouvoir la comprendre, de se trouver trop laid ou même indigne d’elle, d’avoir tout essayé et la voir s’éloigner pour de bon.

Après, la cruauté réside dans les souvenirs. Tu te rappelleras les plus beaux moments que vous avez partagés et tu oublies que c’est bel et bien terminé. Il est même possible que durant votre bonheur, tu t’imagines déjà l’après parce que tu es con, masochiste ou simplement réaliste. Même si ce n’était plus possible, tu crois que c’est encore l’amour qui t’habite et dirige des rêves parfois plus vrais que le jour. Il est cruel, car il te rappelle que le bonheur est possible, mais que toi, tu as craché dessus. Il reviendra ce bonheur, aussi cruel que l’amour, mais il prendra tout de même le temps de se venger.

Il est vrai de dire que l’amour est toujours cruel; comme nous avec les autres. Malgré tout, il vaut mieux lui sourire que le laisser t’ignorer.

mardi 22 octobre 2013

Le grand

Salut le grand,

25 ans...je pensais tellement que tu avais un plus grand écart d'âge avec moi...faut dire que mes souvenirs te concernant ne sont pas tous clairs. J'écoute System of A Down à soir parce que je sais que comme mes autres frères et ma soeur, tu triperais à chaque toune. À ton âge, tu serais peut-être à l'université, dans une école d'art ou sur un chantier, qui sait ? Mais si tu savais à quel point c'est pas important. Juste le fait que je puisse te parler serait le plus grand des bonheurs.

À soir le grand, j'ai ouvert une tite bière; rien de bin fancy, une Belle Gueule blonde...ça fait la job. Tu le sais que je fais pas ça d'habitude : je bois pas, ou très rarement, seul chez nous...surtout en milieu de semaine. Mais je sais pas, à soir, je suis pas tout seul. Je t'en ai ouvert une aussi, tu peux pas haïr la bière : tu es mon frère !

J'écoute du piano aussi. Je repense à tes toiles, à ton côté artiste et à ton calme. T'étais un ti-gars, mais là tu es grand. Tu es comme les autres Michaud : un asti de tête dure, un chialeux pis un gueulard...mais tu es un doux au fond. Pas mal certain que tu chanterais avec moi, avec nous. 

Les autres sont pas toujours avec moi, je les vois pas assez souvent, mais je sais qu'ils sont là...comme toi. T'es parti trop tôt, comme le gars plate dans un party...mais c'était pas de ta faute. T'avais peut-être trop de fun, mon frère, pour voir que la vie allait te rentrer dedans. On était tous des enfants ce jour-là.

Mais là tu es grand mon frère, 25 ans aujourd'hui. Tu as changé. Mes souvenirs se transforment en possibilités et je te vois fier et fort. Plus fort que ton grand frère, mais pas aussi fier. Tout a changé un jour d'hiver, mais c'est l'automne qui t'a offert à nous. C'est pour ça que ce soir j'ai juste versé une larme; une petite goutte dans laquelle tu verras ton sourire. 

Bon, je vais aller finir ma bière, je travaille demain. Juste te dire, le grand, qu'à soir je suis triste, mais surtout content parce que je suis capable de te parler, de t'écrire sans remords pour autrefois. À soir, Mathieu, j'te prends comme tu devrais être : grand. Bonne fête.

dimanche 20 octobre 2013

Femmes, encore : L'Ardente rousse

Elle me fait peur, mais pas assez pour m’arrêter. Malgré qu’elle soit loin, on dirait qu’elle se trouve constamment au-dessus de mon épaule à attendre que je bouge. C’est sa spontanéité et son naturel sauvage qui m’attire même si elle tente de se cacher.  Avec elle, les nuits n’existent plus. Il m’est impossible de dormir quand elle est là. Je ne cesse de la regarder; rien ne compte une fois qu’elle est entrée dans ma tête. Quand elle parle, je ne peux rien faire d’autre qu’écouter. Elle apprécie mes mots, mais je vois bien qu’ils restent en suspens et attendent de connaître leur destination.

C’est une force que je tente de jauger, une sensualité libre qui veut se garder prisonnière. Malgré le froid transporté par les vents du nord, sa simple présence réchauffe mon sang et alimente mes folies. C’est vers l’impensable que je me projette.  C'est la tourmente qui me guide vers elle à des moments inopportuns. Je lui parle, mais elle ne réagit pas. Je m'approche en la fixant pour finalement l'empoigner pour l'empêcher de fuir. Mon étreinte reste gravée sur sa peau laiteuse. Elle feint la fuite pour me captiver, pour s'assurer que je reste fort.

Nos lèvres finissent par s'entrechoquer  sans s'attarder au monde qui tourne, ni aux cieux témoins de passions plus patientes. Nos corps s'appellent sans retenue et sans exigences. On ne veut pas attendre : il faut goûter sans arrêt, sans obstacle, sans délai. Force et tendresse s'entremêlent pour nous donner le plus beau des plaisirs. La passion s'engage à rester  pour nous masquer d'une lune trop froide et des étoiles bavardes. Rien que nous deux; les ruines de la solitude disparaissent entre chaque baiser.

mercredi 16 octobre 2013

Femmes, encore : Démence cuivré

Le fruit défendu. C’est elle que je n’ose approcher, car je veux qu’elle soit là, même si elle fait la sourde oreille. Je préfère qu’elle soit mon quotidien lointain que de la perdre parce que j’ai osé.  C’est sa douceur qui pollue mes jours et sa possible volupté qui contre mon sommeil. Même si la passion finissait par s’inviter, c’est ce calme et cette grisante lenteur qui alimente mon imagination. Au-delà de la tentation, c’est l’abyssale incertitude que je vois dans ses yeux qui alimente ce désir de tout savoir.

Je remercie le soleil de mai qui lui permet de me laisser découvrir ses délicates formes aux accents insouciantes.  C’est quand elle marche que tout s’arrête. Le temps de quelques pas, le monde s'offre à moi. Rien d’autre n’existe quand elle est là et qu’elle daigne poser son regard si mélodieux sur ma personne. Son sourire m’achève lorsqu’il s’efface à la fin de cette course.

C’est une valse naïve qui l’amène dans mes bras le temps de quelques mots maladroits et d’un espoir sans assise. Toucher à cette peau me fait perdre tous mes moyens. Déstabilisé, je me laisse porter par des rêves d’adolescent poète. C’est trop de romantisme pour que ce soit vrai; alors je déclare forfait.

C’est trop difficile de la voir ailleurs que dans mes bras. Je m'imagine entre ses reins, plus doux, amoureux et rêveur. Sa peau et ses respirations fortes, mais discrètes, dont j'essaye de m'emparer, me font vivre autre chose que le plaisir, c'est une communion.

mardi 15 octobre 2013

Femmes, encore : Noir de jais

C’est le mystère qui s’époumone quand je croise son regard. Je ne sais jamais quoi penser, mais je me sens obligé de rester là à attendre qu’elle s’approche. Sa peau hâlée me rappelle l’été qui danse au son des guitares du sud et des voix rauques. Ce n’est pas que la sensualité que je sens quand je l’approche; c’est le désir rageur qu’on enferme. Trop d’énergie pour une seule fois; je la cherche comme si elle était perdue. Je rêve de la voir danser, de m’en approcher et d’y toucher que quelques secondes, le temps de voir cette chair de poule annoncer un plaisir discret. Elle n’est pas le bonheur, mais bien l’obsession des soirs incorrects et d’alambics.

C’est la fête quand je lui parle, mais elle n’y est pas toujours. L’absence et la fuite sont aussi ses alliés. Parce qu’une seule fois n’est peut-être pas assez, mais il est complexe de s’en approcher pour se répéter ou seulement se faire comprendre. Même si elle dit aimer la solitude, je la sens trop sensible pour s’empêcher de sourire aux prochains frissons qui s’inviteront dans la prochaine pinte.

L’ennui alimente mes délires et me ramène à cette nuit imaginée qui ne se terminait jamais. Les rumeurs du soir étaient ponctuées par ses gémissements rebelles et ma propre voix chuchotant l’éphémère.  Je la trouve magnifique, j’aime l’entendre parler et me raconter, mais c’est seulement en sueur après le crépuscule d’été que je suis capable de me l’imaginer.

C’est cette chaleur libidineuse et son odeur qui composent l’image de cette chevelure que l’on voit curieusement mieux la nuit. 

samedi 12 octobre 2013

Femmes

Chaque fois que je la vois, c'est comme une nouvelle fois, l'unique fois où j'allais la voir. Je ne sais jamais quoi dire, ni quoi faire. Elle est belle, douce et reste mystérieuse malgré son apparente simplicité. Je sais que je ne pourrai jamais rien lui dire pour lui expliquer ce qu'elle m'inspire, je sais déjà que si je le fais, c'est son sourire que je perdrai.

Il y a celle qui m'a déjà eu. Celle qui m'a avoué que je lui plaisais, que tout ce qu'elle avait en tête en me voyant c'est une lutte entre nos deux corps, un plaisir libertin, des moments muets où nos regards se posent trop de questions. Malgré le fait que nous nous attirons sans répit,  nous savons que nous n'irons jamais plus loin.

Il y a celle qui m'écoute et que j'écoute. Celle avec qui rien ne s'est passé et rien ne se passera parce que je suis moi, parce qu'elle est comme elle est, parce que la peur nous dicte tout. Les plus beaux moments resteront que des images et des fantasmes qui s'effaceront pour que l'amitié puisse durer, puisse prendre une place qui lui revient peut-être.

Il y a celle d'avant. Que je ne vois plus, mais qui reste tout de même présente. Les souvenirs et signes du quotidien sont effacés; c'est ce qui est le plus troublant. Je ne réalise plus que ma vie à changé il n'y a pas si longtemps. Ses yeux ne sont plus; que de vagues impressions et une amertume. Même si son corps me calmait, m'enflammait et son coeur m'aimait; je ne n'admets plus mon passé avec elle.

Il y a celle qui m'intrigue. Celle qui ne se doute de rien, mais qui chaque jour réveille ce goût du risque, ce désir d'être spontané et l'obligation de combattre. Elle est toujours plus loin que je le crois et je me dois tout de même d'avancer pour voir si elle me regarde. Je me demande si je dois chanter, crier ou l'étreindre sans autre avertissement afin de comprendre enfin ce qui la compose. Pas assez proche pour me lancer, pas assez loin pour l'ignorer.

Chaque nuit, elles me reviennent pour me rappeler que je suis toujours seul. Malgré mes mensonges qui se manifestent sous le couvert de l'espoir, la réalité demeure. Elles sont toutes là à me regarder et à me dire tout simplement : ''non''.

samedi 28 septembre 2013

Si tu savais, tu m'oublierais.

-Si tu savais, ça ne changerait rien. Parce qu'au fond, nos vies se poursuivront encore même si je me tais.
-L'hiver tarde, viendront tes larmes. -inspiration libre.
-Cultiver la force, nourrir la rage qui s'emprunte même si elle se considère prophète.
-Rien au monde que l'ivresse unique sans saveur, sans souvenir, sans erreur.
-Oublier qu'on est prisonnier de soi le temps que les autres te laissent aller.
-Un temps qui se dit plus doux que les lendemains responsables, une veille sans réelle conséquence.
-Dormir par procuration, par malheur et surtout pour montrer que la seule psychose que tu connaisses ne parle pas la langue.
-Le désordre tu l'oublies le temps d'un fantasme.
-La seule colère qui me meuve est celle qui sonne juste.
-Tu pourras comprendre à la fin quand rien d'autre ne comptera.

-La fin est un mot de trois lettres qui, finalement, ne se conjugue pas.

dimanche 22 septembre 2013

Je t'aime

Dire ''je t'aime'' c'est compliqué. Même si on le dit à notre famille, à nos amis qui savent déjà tout ça, ce n'est jamais facile d'être sincère quand on parle d'amour. On ne comprend pas toujours ce que cela comporte, mais on veut aimer malgré les conséquences. La vie nous rappelle tous les jours que l'amour est éphémère et qu'il se terminera quand l'autre ne voudra plus de nous ou si la fin est arrivée. Que ce soit en la prenant dans nos bras, en embrassant, en faisant l'amour ou avec les mots, on devient esclave d'un trouble réconfortant, d'une obligation qui se rapproche de l'intuition. La mère pleurera son enfant même s'il l'a blessé ou tenté de l'oublier. L'amour des parents est aussi complexe que l'amour des amants, seulement, il est plus borné.

Dire ''je t'aime'' c'est tout. C'est tenter d'être vrai le temps d'un regard. Même si elle est loin, qu'elle ne sait pas ou qu'elle s'en fiche, l'amour reste là. C'est avec l'amour tenace et constant que l'on construit autre chose; une histoire que l'on aimerait raconter. On s'imagine la protéger par l'étreinte, la rendre heureuse par les simples caresses et la rendre divine grâce au sexe...même si l'amour s'échappe entre deux battements. L'amour n'est jamais secret : il trouve toujours un chemin. Sur les reflets de ses cheveux et les salutations quotidiennes, c'est l'espoir et l'envie qui reviennent pour fredonner des airs un peu trop familiers.

Dire ''je t'aime'' c'est fort. Quand les mots sont ponctués de battements de cœur nerveux, même s'ils sont maladroits, ils seront les plus beaux. Attendre que tout devienne réel et se préparer au pire, c'est ce qui rend l'amour l'égal de notre essence, aussi fort que la vie qui peut s'échapper. L'amour peut rester présent malgré l'absence du reste, mais il restera tout de même un fantasme idéalisé ou la version périmée d'un souvenir. Le plus dangereux est de devenir esclave de ce qui a déjà été. Malgré tout, c'est ce qui prendra toujours le plus de place.


Dire ''je t'aime'' c'est surtout tomber et se demander jusqu'où, justement, on peut tomber.

lundi 9 septembre 2013

Rage, nécessité et vengeance

Il détestait ce genre de bar : de la musique électro beaucoup trop forte, une chaleur suffocante et des gens complètement coupés de toute réalité. Avec la foule qui s'agglutinait sur la piste de danse, il avait de la difficulté à faire avancer son otage. L'éclairage, la musique et la foule lui offrirent tout de même un avantage considérable vu la situation : la discrétion. Personne n'avait remarqué qu'il tenait fermement son Beretta et qu'il menaçait un jeune homme avec en lui plantant le canon profondément dans le dos. La démarche maladroite de l'otage passa aussi inaperçue.

Il cherchait quelqu'un; un homme avec un surnom bizarre qui contrôlait les voyons du quartier et leurs différents rackets. Depuis quelques mois, rien n'allait dans les rues; autrefois on parlait de respect et de bonnes relations, maintenant c'était une guerre ouverte. Deux de ses copains étaient morts lors d'une fusillade dans un restaurant, un autre avait été enlevé puis torturé...la rue changeait, il allait emboîter le pas.

Il faisait tellement chaud qu'il avait l'impression de respirer de la sueur. Malgré la chaleur, il avait insisté auprès du portier pour garder son manteau en lui donnant un billet de 100 dollars. C'est d'un pas décidé qu'il entreprit de traverser la piste de danse avec son otage. Il y avait trop de portiers près du bar et autour des danseurs, ils seraient plus discrets en plein milieu de la foule. Pour s'assurer de la collaboration de son otage, il lui avait également glissé une petite quantité d'explosif dans la bouche en lui promettant de repeindre la salle avec sa cervelle s'il tentait la moindre manœuvre pouvant lui nuire; c'était aussi une excellente façon de s'assurer de son silence.

C'est au centre de la piste que son coeur se mit à battre si fort qu'il avait l'impression ne plus entendre la musique assourdissante et les cris des fêtards. Une forte odeur d'alcool le ramena à lui. Plus il s'approchait de sa cible, plus il devait motiver son otage à avancer. Une pression accrue du canon de son arme dans le dos de ce dernier finissait par le faire avancer. La marche était plus lente vu l'attroupement, mais rien ne pouvait l'arrêter.

La première fois qu'il avait entendu parler du ''Prêtre'', c'est après une histoire de surdose dans un appartement près du sien. Une adolescente était morte après avoir pris des cachets que certains appelaient ''Corpus Christi''...le corps du Christ. Il s'était alors renseigné auprès d'autres revendeurs pour savoir qui se faisait appeler Le Prêtre. Tout ce qu'il avait pu savoir à ce moment-là, c'est qu'il s'agissait d'un gars qui avait réussi à s'allier les différents gangs pour se former une véritable armée. Les dirigeants de La Famille trouvèrent ses révélations inquiétantes, mais selon les différents chefs, rien qu'ils ne pourraient régler.

Cet homme resta un mystère jusqu'au jour où le Consigliere de la Famille fût assassiné dans sa maison en plein jour. Cloué à l'un de ses murs, quelqu'un grava un message dans sa chair : ''Vous devriez écouter les conseils et la voix de notre Seigneur.'' La maison était truffée de caméras dont les enregistrements ne furent pas remis à la police.

La Famille découvrit que ce prêtre avait agi seul : un homme sans trait particulier et avec une physionomie plus qu'ordinaire réussie tout de même à maîtriser deux des gardes du corps et sa victime. D'un seul bras, il souleva le vieux conseiller et de l'autre prit d'énormes clous dans son manteau pour fixer sa victime au mur, et ce, sans marteau. Le seul signe distinctif était le col romain que portait l'assassin...et ce regard vide et calme. C'est après la mort de ses amis que le Prêtre et son organisation s’étaient révélés au grand jour.

La musique semblait de plus en plus forte et la foule de plus en plus agitée. L'excitation était à son comble. Son otage, un jeune trafiquant qu'il avait questionné en menaçant la sœur de ce dernier,  avait fini par lui avouer que son patron allait être dans ce bar le soir même. Il fallait saisir cette chance. À l'autre bout de la piste, un petit escalier menait aux tables et banquettes. Il se mit à chercher l'homme au col romain; il ne serait pas difficile à trouver selon lui. Après quelques minutes, son otage s'agita : un homme s'approchait. Il devait être une connaissance de son otage, mais il n'avait pas le temps à perdre. Il ne voulait pas être repéré par le Prêtre ou ses hommes. C'est lorsqu'il cherchait une façon de se débarrasser de ce gêneur qu'il aperçut cet homme assis et profitant paisiblement de la compagnie de jeunes femmes sur une banquette à sa droite; il était le seul de tout le bar à porter un col romain. Il passa rapidement sa main dans son dos pour dégainer un couteau qu'il avait dissimulé. C'est à ce moment que son otage et lui tombèrent nez à nez avec celui les ayant vues.

-Hey, mais qu'est-ce que tu fais ? Ça fait trois heures que j'essaie de te rejoindre. C'est qui le connard derrière toi ? Hey, dégages sale con !

Il allait pousser l'homme derrière son ami lorsque ce dernier le poignarda à trois reprises dans l'abdomen en y laissant son couteau.

Il ne voulait pas tuer sans raison, mais il ne pouvait pas perdre de temps. Il se dirigea aussitôt vers la banquette où était assis le Prêtre; ce dernier ne le vit pas venir. Après quelques pas vers sa prochaine victime, il entendit la foule réagir à son premier meurtre. La musique s'interrompit au moment où il tira le premier coup de feu. La panique s'empara des fêtards qui se ruèrent aussitôt vers les sorties.
La première balle vint se loger dans le bas ventre du Prêtre qui ne réagit pas, puis une seconde en pleine poitrine, une troisième dans la gorge puis trois autres dans la tête. Après quelques secondes tout était terminé. C'est la rage qu'il l'avait conduit jusqu'ici, la nécessité tua un homme qui se trouvant sur son chemin et la vengeance exécuta son ennemi. Après quelques minutes, il était seul devant le Prêtre; le bar était complètement vide. Une odeur de poudre de mêlait maintenant à celle de l'humidité et de la sueur. Il observait paisiblement celui qui avait fait tuer ses amis et fait tant de mal à la Famille. Ce qu'il lu sur le visage de sa victime le troubla : du plaisir. L'homme portant ce ridicule col romain ne semblait, malheureusement, pas avoir souffert. Il rengaina son pistolet, cracha sur le cadavre puis se retourna pour quitter l'endroit.


C'est à ce moment qu'une voix l'interpella : ''Ne soyez pas si prompt à quitter ma compagnie cher ami, n'ayez pas peur, je vous expliquerai...vous savez ce que l'on dit : les voies du seigneur sont impénétrables !''

dimanche 1 septembre 2013

Parler

L'homme qui se trouvait devant elle n'avait rien de particulier. C'est ce qu'il disait qui la rendait triste : il voulait mourir. Il lui avait avoué qu'il y avait pensé plus d'une fois. Ce n'est pas la première fois qu'elle entendait cela, c'était son boulot après tout. Mais elle ne comprenait pas pourquoi cet homme était si triste. Elle comprit plus tard que c'était son imagination qui alimentait des espoirs et des rêves que lui-même ne comprenait pas. Mais tenter de l'extirper de là allait le rendre tout simplement fou.

Il pensait parfois à la pendaison, d'autre fois à des lames et finalement, il s'était même renseigné afin de se procurer une arme à feu. C'est sa tête qui ne s'arrêtait jamais. Il n'avait jamais l'air en contrôle de son esprit qui se promenait d'une idée à l'autre, d'un problème vers un malheur annoncé. On avait beau lui dire que tout pouvait s'arranger et même s'il y croyait, son regard restait l'un des plus tristes qu'elle avait rencontré. On pouvait bien lui dire qu'il n'était pas le seul à souffrir, qu'il y a des gens qui souffrent beaucoup plus que lui...mais cela ne changera rien à ce qu'il est et ressent. Elle avait bien compris qu'il était empathique, ouvert et généreux, mais elle s'est vite rendu compte que de comparer les souffrances ne servira jamais à rien.

Les semaines passaient et elle se demandait toujours si elle allait le revoir. Mais tous les mercredis, il venait cogner à sa porte pour essayer de comprendre. Il parlait sans cesse, il parlait de lui et gardait pour son esprit les vrais problèmes. Il se confiait parfois sur les femmes de sa vie, sur ses désirs, sur les impasses qui nourrissaient un malheur fort, tellement fort qu'il devenait difficile à cerner.

Lui-même ne réussirait jamais à découvrir pourquoi tout finissait par lui faire fermer les yeux. Même la plus grande des douceurs lui faisait regretter qu'elle ne soit pas plus amère. Au fil du temps, comme lui, elle s'était accommodée de son regard toujours en attente et de l'abandon qui conduisait son coeur. Au moins, elle lui permettait d'exprimer le peu qu'il déchiffrait dans ses larmes soudaines et sa solitude harcelante. Il était étonné de voir qu'il se refusait depuis peu aux marques d'affection, surtout les physiques...il avait peur, mais ne savait de quoi.

Il lui avait déjà raconté qu'un jour il se trouvait seul assis à son bureau. La journée se passait comme toutes les autres, mais il se mit à penser à autre chose, à une vie différente, à une vie moins uniforme que la veille. La radio jouait en bruit de fond, ses collègues tournaient autour de lui, son écran ouvert devant ses yeux, mais il n'y avait plus rien pour  le ramener à son existence. Le tout se terminait toujours par des sanglots étouffés. Il confia à cette femme que ces absences mélancoliques venaient tous les jours le corriger, le distraire et le sortir du quotidien pour lui jouer un tour.

C'est la dernière fois qu'elle lui parla. Rien de spécial ou de grandiose pour cette dernière visite; que la même salutation qu'il lui offrait toutes les semaines : ''Merci , on va peut-être se revoir la semaine prochaine...qui sait ?''

mardi 20 août 2013

Un soir d’alambic et de fausses promesses

C’était un soir d’alambic et de fausses promesses, l’ivresse s’alliait à la chaleur pour me souffler des mots libres et des images que j’avais moi-même dessinées. Je ne sais pas pourquoi je suis si bien dans cet état oscillant entre paix et violence. Chaque gorgée me redonne la force qu’il me faut pour faire un pas de plus, discourir encore quelques minutes, me rappeler pour quelles raisons je suis malheureux. L’amertume éveille mes sens;  je songe à ceux qui gagnent leurs vies en nous enivrant. Je me suis toujours demandé s’ils sont conscients du bien qu’ils me font lorsqu’ils me permettent de prendre un autre verre.

Avant d’échanger avec la bouteille, ce sont des promesses qui sont venues discuter avec moi. Certaines provenaient de mon imagination, d’autres de signes que je n’ai su voir et, finalement, il y avait ces promesses que je m’étais faite. J’aurais dû fuir : je devais apprendre à vivre avec la tristesse des soirs râleurs et des nuits solitaires. Malgré tout, j’y plonge. Parfois, c’est en cuvant mon vin que je revois le mieux comment je suis arrivé ici. C’est avec force que j’ai suivi ma route, mais avec regret. Il m’est difficile de vivre maintenant. Avec les attentes des uns et les souvenirs d’autres, je ne pourrai plus jamais être comme je le voudrais.

J’y songe lors de ces soirées où tous perdent le contrôle.  Le passé parle de nouveau ma langue sous les étoiles. C’est de nostalgie que se construisent nos fêtes. C’est au goulot que l’on attend le regard amoureux, l’oreille attentive ou cette main qui se mettra, elle aussi, à parler. Entre les verres se succèdent des mots vrais que je retenais, des respirations franches, le courage d’espérer et les cœurs exilés. À force de boire, on tente de trouver le fond. Même assis par terre, il est toujours possible de tomber.

C’est se libérer que de consentir à étancher notre soif. Les plus belles de nos promesses sont celles qui nous furent inspirées par des pénombres aussi sincères. Même si personne ne parle, tout le monde comprend la suite. Que ce soit la bière du soir, le vin des repas ou les liqueurs des discussions; la mélancolie franchira toujours le pas sans y être invitée.

C’est seul que tout se manifeste. C’est à cet instant que je constate que ma plume, ma tristesse, mon imagination, les enivrants et les mots me permettent chaque jour de vivre mon chef-d’œuvre.

Lorsque viennent enfin les soirs d’alambic et de fausses promesses, j’arrête enfin de rêver.

samedi 10 août 2013

Ceux qui restent

Ce sont des larmes qui se sont mises à parler. Comme si tout devait se terminer, il se laissant aller vers la mémoire des autres. Le plus jeune de ses espoirs s'était, lui aussi, enfui. Certains disent que c'est le mal qui l'avait usé, mais tous se refusèrent à lui dire au revoir. 

Son verre était vide, la gorge toujours nouée par l'improbable et les refus de mettre un terme à cette comédie. Il y a bien longtemps que personne n'avait ri, qu'on s'était lassé des vérités et de cette chaleur qu'il osait offrir à ceux qu'il aimait. C'est lors d'un dernier soir de solitude qu'il s'était mis à chanter. Les mots se chargeaient de le conduire dans la pénombre, les rythmes soutenaient son cœur et les notes se battaient entre elles pour finir sur ses lèvres. Que du vent qui usurpe et attise. 

C'est dans un fauteuil plus âgé que lui qu'il inspira une dernière fois; en attendant les remords du monde et la douce caresse de l'acceptation. Cela n'a jamais été une question de nostalgie apprivoisée ou de masochisme consommé, mais bien une question que son simple esprit retrouvait chaque nuit.

C'est un jour de colère qui le découvrit au repos près de son verre et de flammes presque éteintes. Ses yeux restèrent aux aguets, prêts à saluer les premiers curieux malgré l'absence de leur maître. La bouche close, il nous dévoilait la fin de ses discours et des chants sincères. La fin de cette éloquente chute allait libérer un entourage indifférent.

Il fût mené à l'abri des chagrins artificiels et intéressés pour qu'un dernier souffle soit entendu. Seul devant la glace, il entonna la plus vraie des poésies. C'est un cadavre, depuis longtemps dépouille, qui célébra son passage vers l'acte déjà moribond. 

Ceux qui restent se mirent à converser, à leur tour, avec un chagrin polyglotte et des larmes aux charmes de divas.

C'est toujours ceux qui restent que l'on entend se plaindre de départs souhaités.


vendredi 9 août 2013

Si

Si tu pouvais seulement comprendre pourquoi mes blessures sont bien comme elles sont.
Si tu savais à quel point tes mots sont tout.
Si nos chemins pouvaient enfin se quitter.
Si je pouvais être maître et non esclave.
Si je tombais sans m'en soucier.
Si les possibilités s'effaçaient.
Si les saisons s'accordaient pour nous donner tout notre temps.
Si la tristesse venait te trouver à mon départ.
Si le sommeil pouvait être autre chose qu'une hantise, qu'une vérité que je veux étouffer...tuer.
Si mon souffle discutait avec mes féroces instincts.
Si la douceur pouvait finalement apparaître après des violences qui me rappellent le sang versé.
Si l'excès finissait par se manifester.
Si je devenais mes peurs, mes rages, mes obsessions.
Si je pouvais me calmer.
Si j'étais virtuose.
Si j'étais vengeur.
Si je pouvais vivre sans mon coeur.

Je serais un monstre...rien qu'une nuit , le temps de tout effacer et me faire mentir.

samedi 27 juillet 2013

Sage cauchemar

La gravité des mots me retient tout prêt. C'est sans savoir que tout peut arriver que nous savourons nos extases autant que les souffrances offertes par ce que certains appellent Destin.

Peu importe les mots, les gestes ou les intentions; seul le résultat sera jugé. C'est en s'alliant aux grâces de nuits oppressantes que la folie finit par s'exprimer. Avant, les bouteilles, les cris, les poings, les lames et le sang, ce sont de belles mélodies qui chantent les songes et crachent sur l'évidence. Doucement, on oublie et on se laisse porter sans que le danger puisse se venger.

L'humilité n'est plus, il faut prendre plus que sa place. Les chants se transforment en hymnes vulgaires et en craintes violentes. Sous cette pression, tout s'évade. J'y viens et m'effondre; avec la simple inspiration, je m'y colle.

C'est pour l'amour chaos que je me garde à l'affût de celle pour qui il n'y a pas de dernier verre. Une fois dans mes bras, elle pourra que me manquer. Malgré mes gestes qui se veulent amour, tout se terminera. Je suis conscient qu'elle ne restera pas, mais je ferai, malgré cela, tout pour qu'elle soit heureuse, pour que nos vies s'accompagnent le plus longtemps possible.

Après cela, je serai à nouveau le plus triste le temps de quelques saisons. Puis, je me laisserai de nouveau piéger par mes mains qui tremblent, mon souffle hésitant et un regard que je ne saurai déchiffrer. C'est en cherchant une perfection qu'on trouve celle qui devrait être nôtre.

Ma vie s'apparente sans gêne à un désordre belliqueux qui s'enrage pour défendre sa nature. Elle ne sera jamais autre chose que mon cauchemar.

mercredi 17 juillet 2013

Le pas de trop

Ce sont des images tranquilles qui m’empêchent de dormir.  Rien de spectaculaire, rien de plus fort qu’une simple présence souhaitée.

La vérité s’évade et laisse s’installer une sérénité qui plaît, un état qui ne dérangera personne. Je ne peux espérer sortir de cette folie qui me cloue à mon siège. Les mots s’échappent; je ne pourrai plus qu’écrire…je dois aller plus loin.

Pourtant, tout s’anime en moi malgré la mort qui s’y installe dès le retour de l’intimité solitaire ou de la nuit trop grande pour y séjourner sobre. J’aimerais sincèrement être autre chose, discuter avec les possibles sans m’en faire, laisser mon cœur se reposer…arrêter de l’alimenter de peurs, d’images de catastrophes annoncées et d’échecs sans poète.

Les leçons tardent à venir.

C’est une éternité aux rythmes lacérateurs qui s’installent quand je m’attends à des fantasmes promeneurs ou des désirs sédentaires. Le tout reste magnifique et simple; la réalité gueule, malheureusement, plus fort. Je les laisserais souffrir et agoniser, mais l’espoir et la peur me gardent. Je pense à moi, mais je ne ferai de mal à personne. Ce n’est pas l’envie qui manque, mais cela ne changerait rien.  

J’envie les enfants et leur amour simple, leur amour joie, leur amour vrai. Ce sont ces troubles : le désir, l’amour-passion, l’amour folie, l’affection chaleur et l’espoir tranquille qui transforment et nous laissent pour mort quand nous osons faire un pas qui est souvent de trop.

jeudi 20 juin 2013

Je ne peux être amoureux

Tu devrais savoir : tu me manques. Les jours s’enfuient devant cette image qui reste imprégnée dans mon cœur et qui accapare mon âme. Quand mes yeux se ferment, c’est toi que je vois sourire comme si tu m’attendais impatiemment dans mes rêves. Mais c’est ma réalité qui me fait don d’insomnies et de pensées prenant origine dans un désir que je garde en cage.

Une sobre beauté s’expose à ta rencontre. Ton regard me cloue au sol, ton sourire efface mes plus beaux discours et je redeviens, le temps d’une conversation, un adolescent. Trop timide pour t’exposer ma vérité, trop émotif pour réaliser que tu ne seras jamais autre chose que l’inaccessible.

Dès que je m’éloigne de toi, je te perds, c’est une violente peine d’amour qui me harcèle jusqu’à ce que tu réapparaisses. Je t’imagine amoureuse, furieuse, douce, triste, passionnée; j’aimerais que tout cela existe.  Je veux que tu sois heureuse, que la vie te transporte vers l’insupportable tentation masquant ta raison. Sans que tu t’en doutes : tu me rends fou.

J’aimerais pouvoir te dire comment tu m’inspires et à quel point ta beauté fige tout dans ma vie. Je me demande si tu comprends ce que tu peux faire avec un seul sourire.

Je croyais que le temps serait mon allié et que j’allais m’accoutumer à ta présence, mais rien n’y fait. Rien ni personne ne peut faire taire les songes éveillés que tu me souffles. C’est peut-être la raison qui viendra à bout de moi et qui me fera oublier le courage qu’il me faudrait pour t’inviter ailleurs. C’est te connaître que je veux, c’est tenter de voir plus loin que ton délirant éclat.

Ce sont des mots dont j’ai besoin; ta voix qui pourrait comprendre que je m’abandonne à une admiration plus forte que l’évidence. C’est de loin que je continuerai à penser à toi, c’est en silence que je rêverai à tes bonheurs, c’est seul que je finirai par admettre que ton regard ne pourra jamais se poser sur moi.

samedi 15 juin 2013

Je ne comprends pas

Les faiblesses de mon corps me font peur. Contrairement à la mort, la souffrance m'effraie. Il me reste encore bien des années devant moi et je ne fais que penser aux épreuves et douleurs à venir. Je ne comprends pas toujours ce qui pousse les gens à continuer quand ils savent que l'argent finira par leur manquer, que la maladie finira par les rattraper...que l'amour finira par s'exiler.

La peur sert de défi à certains et s'apparente à un gouffre pour d'autres. Je me retrouve là à attendre, à travailler et à penser sans repos aux possibles et différents futurs qui m'attendent. Tranquillement, le temps change ses discours en berceuses. Il tente de m'endormir et de faire taire des questions qui m'empêchent d'accepter le plus simple des avenirs.

C'est ce questionnement fondamental qui s'accorde et étouffe ce que j'ai d'ambition. Malgré les petits bonheurs qui me saluent tous les jours, je continue à douter; à me demander si le jeu en vaut vraiment la chandelle.

Les sourires et moments où tous sont heureux disparaissent avec les rêves naïfs et les aspirations irréalistes. Il ne reste, au fond, qu'une amertume résiliente citant de tristes souvenirs, des regrets ou des remords oubliés. La vie semble plus douce, mais c'est seulement parce qu'on apprend à vivre avec l'imperfection de nos promesses.

Il faut tout de même être très ambitieux, ou fou, quand on veut le parfait bonheur ou l'inébranlable réalité bâtie pour ses propres rêves. Moi, je crois que c'est de la folie dont je suis devenu ami.  

mercredi 5 juin 2013

Acceptation et autres mensonges

Un seul petit moment où ta franchise siffle d'autres fausses notes.
Des rêves qui se greffent aux matins pluvieux.
Chaque gorgée de bière qui me rapproche du divin oublie.

Simples instants refusant de se parler; ils ont peur de ce que je pourrais dire si je les entendais tous à la fois.
Pourtant, je m'efforce d'oublier que je pourrai, un jour, m'étendre à nouveau près d'une pure tendresse et d'un cœur aussi bordélique que le mien.

Le sang continue de couler malgré de vaporeux, mais pieux vœux  Sensible repentir, je t'ai déjà donné ton congé, mais tu sembles avoir oublié quelque chose, oublié que je veux, et ce à jamais, rester fermement ancré dans la mélancolie. Elle chante mieux et danse comme si les lendemains l'accompagnaient. Je suis le rythme, je tombe et reste allongé. 

Malgré cette blessure d'où je m'échappe et cette fatigue ringarde...je souris.

jeudi 30 mai 2013

À toi, gracieuse promeneuse

C'est même éveillé que je me suis mis à penser à elle. Celle qui porte ce regard insondable. Celle à qui je ne sais quoi dire. C'est finalement la banalité qui m'en approche. Nous parlons sans réelle passion n'y intérêt autre que la politesse.

Cette tranquillité m'écrase en même temps que les craintes d'un cœur devenu sauvage. J'ose la regarder s'approcher, j'espère qu'à ce moment elle sourira et qu'elle ne marchera pas trop vite. Chacun de ses passages me ramène au bien et à la beauté étrangère de l'envie.

Il y a toujours une part de mon être qui s'y accroche quand elle vient. Ainsi, j'essaie de la garder près de moi le temps d'un souffle précipité. Ce désir n'est plus un rêve, mais cette force qui me manque. Elle ignore que sa simple présence transforme quelques minutes en événement et que son passage ravive de vieilles flammes.

Le lendemain de ses douces promenades est toujours plus terne que sa jumelle de la veille. Ses départs sont des deuils que j'endure sans retenue, car je possède au moins cela. Tous ces moments en sa présence sont si éphémères que j'en viens à envier le ciel de pouvoir la contempler sans relâche et la terre de la sentir si proche.

Je vois ses jambes la porter si loin, mais ne peux les blâmer sans les admirer. Ses pas composent une symphonie dans laquelle s'accordent désespoir, résilience et rêve. Le courage pourrait changer ce rythme ensorceleur en danse sans fin, mais il dort encore sous la peur des refus cruels ou naïfs.

Cette peau, encore inconnue, s'impose malgré tout : elle fait bouillir mon sang et trouble mes inspirations. Elle s'allie à de bavardes courbes qui me racontent histoires et fantasmes inspirés par son corps. J'écoute tout sans condamner les images se présentant lors du récit. C'est cette beauté et la sensuelle présence de ce corps qui me brise.

Lorsque sa voix quitte ses si engageantes lèvres, je m'apaise. Rien d'autre n'est vraiment nécessaire; que ce simple chant. C'est dans une lenteur imaginaire que j'aimerais pouvoir lui avouer : c’est avec ta beauté que j'aimerais m'enivrer.

lundi 27 mai 2013

30

C’est avant d’être trop vieux que j’aurais dû être curieux, que j’aurais dû me laisser porter par d’inspirantes pintes, que j’aurais dû comprendre qu’il n’y a rien que je puisse faire avec ma vie. Je n’ai plus le goût d’être confortable et d’attendre la vieillesse comme le premier rendez-vous amoureux. Il y aura donc d’autres choses que la paix sur mon chemin.

Sans pouvoir me trouver, je me perds chez l’autre à vouloir consoler et à m’imaginer que je serai peut-être un jour à ma place. C’est aussi cette impuissance féconde et mon insolente imagination qui m’ont menti quand ils me présentèrent le bonheur : Au diable la réalité, sifflaient-ils, vaut mieux rêver.

Mais, ces songes ne devinrent jamais les apôtres de doux épilogues et d’une juste vie architecte. Ils étaient plutôt les jumeaux des faits et du tangible. Parce que comme moi, mes rêves étaient lucides.

Je fais trop confiance et parle trop souvent à de faux espoirs plus sourds que ceux et celles qu’ils incarnent. Je ne me sens pas la force de crier pour les éloigner. J’utilise douceur et franchise pensant que tout se règlera, pensant que je suis moi. Mais les nuits qui fredonnent des jours plus flous me rappellent que je ne suis rien d’autre qu’un pauvre fantaisiste sans réelle volonté.

C’est à l’aube de cet anniversaire que j’accepte ces instants de démence. Je réalise que je ne comprendrai jamais ce cœur qui s’emballe d’un rien, ces perceptions contradictoires et mes envies tentant de s’échapper de rêves disparus.

Je deviendrai fou bien avant la fin de cette histoire. En attendant, laissez-moi partir.

jeudi 23 mai 2013

L'insulte


J’ai besoin de partir.
C’est ici que je me comprends le moins.

Mon corps n’écoute plus mes ordres; il carbure aux envies retenues et tente de m’effacer.

L’affection ne se quémande pas. On offre son âme et sa douceur en essayant de comprendre qu’être deux c’est prendre ce qu’on est prêt à donner.

L’insulte s’allie aux remords et au quotidien tentant de noyer les espoirs étrangers. J’étais bien avant de m’écouter, j’étais bien avant que mon corps se mette à parler.

lundi 13 mai 2013

Quand elle jouit

(Inspiré, entre autre, par Pierre Lapointe)


Quand elle jouit, je vois dans ses yeux des souhaits qui s'entremêlent et des peurs se concrétiser comme l'étincelle avant la flamme. Ce sont des silences qui s'ennuient que l'on voit nous observer malgré les ombres qui nous enveloppent et les regrets qui nous lient.

Rien que le temps et la course de l'astre pour nous ramener à une réalité trop froide, trop logique pour nous permettre d'être nous. J'entends sa voix m'appeler comme si je n'y étais plus. Je me perds, je ne vois qu'un regard me demandant d'où je viens.

Sa chaleur me transporte vers d'autres désirs, vers d'innombrables matins où je me presserai contre son sein. L'ivresse d'antan s'évade et laisse sa place à l'orgasme prochain, aux baisers sans arrières pensés et aux ratés des cœurs fidèles.

C'est en cette nuit martyre que je repense à ses gémissements discrets et ses mains qui me cherchaient aux moments où elle fût trouvée par Jouissance. Sa douceur tranquille se mit à bouillir et l'odeur du plaisir hurla pour mieux s'évader.

Que ce soit soir ou matin, je reprends ce souvenir, qui se mêle aux rêves, et j'y retourne comme si tout cela pouvait recommencer. Mais tout est terminé. Elle est partie et ne reviendra pas; cette nuit où nous nous sommes contentés de jouir. Les questions ont remplacé les pulsions et les caresses se sont laissées emporter par les silences voyeurs.

Sa peau et ses lèvres n'y sont plus et elle continue à me hanter, car c'est comme si je ne lui avais jamais touché. 

mardi 23 avril 2013

Sourde constance


Je suis trop près de toi. J'ai peur que tu me prennes dans tes bras, que tu m'embrasses et laisse s'éveiller mon coeur. J'ai peur d'être aveuglé par tes faiblesses et ton sourire si sincère. Peur de trop m'attacher à toi, te voir quitter parce qu'il ne faut pas espérer ni changer.

Il m'est difficile de vivre près de toi. Je me perds et imagine ma vie comme si tu pouvais réellement y rester. Mais c'est la rationalité et mes blessures qui me gardent et m'enchaînent pour ne pas que je me perde en toi. À tes côtés, mon coeur me fait mal, mais littéralement. Il bondit et tente de déchirer ma poitrine. Tu me transformes. Je suis faible quand tu me regardes, je ne peux plus me défendre quand ton regard se pose sur moi.

J'ai peur de toi, de ce que tu pourrais me demander, de ce que je vais devenir si, un jour, tu te laisses tomber dans mes bras. J'ai peur des fins qui ne viennent jamais; j'aurai donc peur de la fin de cette histoire qui ne débutera jamais. Je m'enlise dans les infinies possibilités et les images qui s'inspirent de toi.

Je finirai par m'y faire. À te voir heureuse autrement, à vivre avec une autre ce que qui aurait dû se passer avec toi. Je suis près pour une fin sans commencement, pour laisser passer un rêve déjà trop amer. Je vieillis finalement.

Je le savais que ces craintes étaient fondées, qu'elles avaient le droit de crier comme je l'ai fait. Maintenant, je les écoute parce que je suis courageux.

dimanche 21 avril 2013

Au lit

Brève tentation lorsque je retrouve mon lit.
Je garde les yeux ouverts jusqu'à l'aube.
J'imagine la simple expression, l'unique sensation que laisse l'espace vide de mon lit.
J'aperçois de clairs et sombres regards au moment où le sommeil m'appelle. Il est déjà trop tard.
Quand j'ouvre les yeux, tous ont disparu.
Que le son des rêves qui s'évanouissent et du jour moqueur.
Quand vous gagnez l'aube, il y a bien longtemps que je suis parti.

lundi 15 avril 2013

Polluant

T'es-tu endormi sans moi une fois de plus ?
Qu'est s'est-il passé pour que je sois capable de revoir tes yeux ?

Mes sourires m'ont été enlevés il y a si longtemps que la joie m'avertit toujours avant d'arriver. Que le rythme qui vient s'abattre contre mon cœur et qui m'arrête le temps d'un combat.

L'odeur du sang tente de me ramener à moi, mais je me tiens bien droit à regarder des plaies qui me salueront à chaque fois que je me dénuderai.

Jeunesse qui s'en va me rappelle que je ne suis pas sage ni fort. J'ai craché sur vous mes chers, mais sachez que la seule raison de tout cela, c'est que je ne sais pas viser.

vendredi 12 avril 2013

Douze lunes sous les saisons

Les saisons ont passé et me revoilà au printemps. Sous un soleil ayant retrouvé sa force et en regardant fondre la neige, je me souviens.

C'est lors du réveil de la nature que je me suis endormi; que j'ai fui le jour le temps d’accepter et comprendre ce qui allait advenir de moi. Malgré les efforts et les larmes, c’est la fin que j’ai rencontrée au printemps. J’étais au sol, un poids sur la poitrine, incapable de me lever. J’en ai donc profité pour revisiter mes souvenirs. J’ai fait le malheureux constat que tout ce temps, il fallait que je sois quelqu’un d’autre. Dès le début, j’aurais dû me rendre compte que je ne serais jamais moi-même si je me laissais bercer par cette histoire. J’ai pleuré jusqu’à ce que je m’effondre. J’ai crié sans que personne ne puisse fuir quoi que ce soit, je me suis perdu là où je ne voulais jamais aller. Ce sont de douces voix s’accompagnant d’harmonies que j’ai gardées comme confidentes. Je leur répondais en les imitant.

L’été tenta de réchauffer mes nuits. L’astre s’acharna sur moi. La chaleur me tînt éveillé et me harcela. Face à moi-même, je suis devenu fou, hystérique et violent. C’est quand les rues sont pleines que je me suis évadé avec douce Ivresse et ses complices. Je me suis réconcilié avec des mots crus, avec l’attente et la naturelle déception. Je me suis mis à me parler et à laisser entrer les autres comme le font de vrais invités. Malheureusement, j’étais toujours faible. Brisé par l’aveuglement de mes vingt ans, je n’étais tout simplement pas prêt à tout ça. J’ai emménagé avec Solitude. Je voulais la foutre à la porte, mais il fallait que je fasse sa connaissance. J’ai dormi dans d’autres lits pour échapper à ce que je devais faire. Après cela, tout ce que je voulais était de rester dans ces lits qui me permettaient de rêver.

Le vent d’automne me rappela dans ma réalité et me montra qu’il est possible de danser sans tomber. J’étais devenu plus vrai; j’ai réussi à retrouver une partie de ma réelle essence et à la comprendre. Mes mots devinrent réalité et se mêlèrent à mes rêves et désirs. Certains de ces rêves me retrouvèrent dans la réalité, le temps d’une étreinte, d’un verre, d’une discussion, d’un jeu…C’est ainsi, en regardant tomber les feuilles, que j’ai perdu des amis parce que j’étais trop vivant, trop moi. Je n’en veux à personne, parce qu’au fond, ce que je redevenais et désirait ne les intéressaient pas. C’est à ce moment que mes yeux s’ouvrirent et que mon cœur comprit sa propre nature. Malgré tout, j’aurais dû retenir mes élans et ce désir du vrai à tout prix. J’aurais dû contenir ce qui ramena les larmes.

L’hiver gela tout. Je me suis posé pour contempler la longue nuit. C’est le calme qui vint discuter avec moi. Ainsi, paisiblement, je regardais passer les sourires complices et les mots tendres que s’envoyaient les gens. Solitude parlait toujours aussi fort, mais j’avais appris à l’écouter. Les portes closes par le vent et le froid gardaient les autres loin de moi. J’ai dû vivre plus simplement. La nuit ne se terminait jamais. Le son du piano guidait mes pas dans les tempêtes pour que je puisse retrouver ce qui me plaisait encore chez ces autres. Ce sont les portes de curieux établissements que j’ai poussées. J’y suis entré et m’y suis engourdi sans réelle raison ni but précis. J’y étais, c’est tout. J’ai erré au gré des vents du nord, j’ai bu ce qu’on m’offrait jusqu’au lever du jour. C’est lors de cet hiver que j’ai accepté de vivre sans grand bonheur.

Le printemps tarde à revenir. Je l’attends pour qu’il puisse me dire si j’ai réellement changé suite au passage des douze lunes. Je sais que je bois, je chante, je danse, je pleure et que j’espère autrement. Mais, c’est cette nature qui tente de me plaire et me guérir qui pourra réellement me dire si tout est bien du passé. En attendant, je reste assis là à attendre et à apprendre comment on se garde de la folie.

mercredi 20 mars 2013

La démone et le bâtard


La nuit était jeune. Le groupe de soldats eut enfin une permission. Depuis les trois derniers mois, ils arpentaient les routes du royaume comme mercenaires à la solde de l’armée royale. Des semaines à combattre les tribus de l’est et à assurer la sécurité sur les grandes routes marchandes. L’armée de mercenaires, dont ils faisaient partie, travaillait avec le royaume depuis près d’un an, mais l’affectation à l’est était récente.

Les cinq soldats avaient bien profité du fait d’être postés dans un village près de la route royale pour doubler leurs soldes en faisant chanter et en menaçant les marchands. Ainsi, ils avaient de belles sommes à dépenser ce soir dans la capitale.
Lyra, la capitale du Mitan, était l’endroit parfait pour faire de bonnes affaires, mais aussi pour s’amuser. Près du marché central se trouvait le quartier chaud de la ville où l’on pouvait trouver auberges, maisons de jeux, bordels et autres endroits pour se divertir. Le premier arrêt des jeunes soldats fut à une auberge pour s’assurer d’avoir un endroit où dormir une fois la nuit tombée. Le Tonneau Fredonneur était un établissement reconnu pour la qualité des spectacles qu’on y présentait. Les chambres étaient propres et le prix raisonnable. Ils prirent donc deux chambres. Trois d’entre eux décidèrent de s’entasser dans une chambre afin de réduire le coût de leur logis et ainsi avoir plus de pièces à dépenser ailleurs.

Une fois les chevaux aux écuries, les chambres payées et les bagages rangés; les cinq soldats se rendirent au marché. Louis, l’un des soldats, était très heureux de pouvoir profiter de quelques jours de repos : il allait pouvoir acheter du nouvel équipement. Les marchands avaient, pour la plupart, bien répondu au chantage. Grâce à cela, il pouvait s’offrir une nouvelle lame et un casque plus résistant et plus ajusté, donc, plus confortable. Ses compagnons aussi voulaient en profiter pour s’offrir de la qualité. Un d’eux se procura de nouveaux carquois remplis de flèches de différents genres : pointes rondes pour briser les os, pointes sifflantes pour donner l’alerte, pointes barbelées, etc. Un autre trouva de nouvelles bottes et un bouclier en écu fait d’acier. L’homme qu’ils surnommaient tous l’Ours, vu sa carrure et sa pilosité, mit la main sur une cotte de mailles qu’il fît aussitôt ajuster. Le dernier d’entre eux s’acheta une série de dagues, deux longs poignards et une arbalète.

Les soldats étaient tous très contents de leurs trouvailles. De l’équipement neuf allait faire des jaloux au camp. La solde qu’ils reçoivent ne leur permettait pas de faire de tels achats normalement. Pour remplacer ce qui était endommagé, ils comptaient sur la prise qu’ils faisaient sur les vaincus lors des batailles.

Ils reprirent donc le chemin de l’auberge pour déposer leurs achats. Sur le chemin, Louis eut l’impression d’être suivi. Il se retourna, mais ne vit rien. Que des passants qui ne portaient aucune attention au jeune soldat. Rassuré, il rejoignit ses compagnons. Une fois leur butin déposé dans les chambres, les cinq prirent place dans la salle commune, commandèrent à souper et ce qu’il fallait pour faire descendre le tout. Ils s’offrirent le meilleur : faisans, pommes de terres cuites dans la graisse de cochon, du cerf en mijoté, du pain, du fromage et, bien entendu, de la bière du nord en grande quantité.

Plus l’heure avançait, plus la salle se remplissait. Le souper au Tonneau était très populaire : bonne nourriture, boissons abondantes et de talentueux ménestrels et autres amuseurs publics. Plus il y avait de monde, plus Louis se sentait inconfortable : cette sensation qu’on l’observait lui était revenue après sa dernière portion de cerf. Il scruta la salle de long en large à plus d’une reprise, mais il ne remarqua rien.

Après le repas, ils commandèrent un spiritueux brassé par les nains afin de les aider à digérer. L’établissement employait un sommelier pour tenir la cave et vendre les boissons plus couteuses aux clients dépensiers. Il s’agissait, bien entendu, d’un nain. Il apporta ses meilleurs bouteilles et flacons pour le groupe. L’Ours s’entendait particulièrement bien avec lui. Plusieurs gorgées plus tard, le groupe appréciait de plus en plus le spectacle offert par les bardes et ménestrels. Ils se mettaient à chanter en cœur dès qu’ils reconnaissaient un air de musique. Le nain d’était même attablé avec eux et vidait ses flacons avec l’Ours sans rien demander en retour.

Mais Louis n’était pas aussi festif que ses compagnons. Pour faire plaisir aux autres, il avait gouté un alcool nain à base de champignons et de mousses que l’on retrouve dans les mines de Barum. Un nectar selon leur nouvel ami. Autant pour le goût infect et brulant du breuvage que pour cette crainte qui le gagnait, il refusa les autres verres qu’on lui offrit après celui-là.

Louis avait bien repéré un groupe un peu louche assit près de la petite scène au fond de la salle : deux elfes, un vêtu d’une robe de mage bleu royal et l’autre portant une armure de cuir souple et un sabre au flanc droit, accompagné par une femme humaine très séduisante portant une tunique vert émeraude usée par de nombreux voyages et une cape dont la capuche était rabattue vers l’arrière. Il avait remarqué que les elfes regardaient souvent en direction du groupe de soldats, mais Louis finit par comprendre que ces regards étaient plus spécifiquement dirigés vers le nain et l’Ours qui chantaient fort et particulièrement faux. Le tout avait vraiment l’air de leur déplaire.

Louis fût tiré de sa réflexion par l’un de ses compagnons :

-Hey Louis, tu viens ? On va jouer aux dés près d’ici. Le nain connaît un endroit.

-Oui, j’arrive.

Il se leva et suivit le groupe qui avançait plus lentement qu’à leur arrivée vu l’alcool qu’ils avaient ingéré.
Les rues étaient animées malgré l’heure. La lune était presque à son zénith, mais on entendait la musique et les cris provenant des auberges et la grande place était pleine d’amuseurs publics, de kiosques vendant de la nourriture et de l’alcool. Un des amis de Louis en profita pour se prendre un petit verre pour la route.

Ils traversèrent donc la grande place et empruntèrent une rue menant vers le quartier des enclumes, où se trouvent la plupart des forgerons de la ville. Après quelques minutes de marche, Louis se sentit à nouveau observé, mais cette fois-ci, il ne se retourna pas. Il était nerveux depuis qu’il avait fait ses achats au marché; il ne voulait tout simplement pas se faire voler ses nouvelles acquisitions et c’est surement ce qui l’avait rendu, selon lui, paranoïaque.

Mais c’est au détour d’une ruelle qu’il comprit que tout ce temps, ils étaient bel et bien suivi. Lorsqu’ils furent tous engagés dans la ruelle, le nain, qui guidait les jeunes soldats, s’arrêta brusquement, se pencha et se mit à vomir. L’odeur était si forte que même l’Ours, reconnu pour bien tenir l’alcool, eu des hauts le cœur. Ils se mirent tous à rire lorsque le nain releva la tête : ils virent la barbe de leur guide souillée par le contenu de son estomac qu’il venait de régurgiter. Ce dernier d’essuya la bouche avec la manche de sa tunique et se mit également à rire.

-Ouais, c’était pas n’importe quoi ça ! dit-il en regardant le flacon qu’il avait vidé d’un trait deux coins de rue plus tôt.

-J’aimerais bien gouter. Lança une voix provenant derrière le groupe.

Les soldats se retournèrent aussitôt pour voir qui avait exprimé ce souhait. Ils virent une jeune femme vêtue d’une légère tunique noire et d’une cape dont la capuche couvrait sa tête. Louis pensait être devant la femme qu’il avait aperçue à l’auberge.

-Hey, je vous ai vu à l’auberge ! Qu’est-ce que vous nous voulez ?

-J’ai bien vu que tu m’as cherché toute la journée, mais tu ne m’as jamais vu. Celle que tu as repérée à l’auberge y est encore.

En répondant à Louis, la jeune femme rabattit son capuchon vers l’arrière. Les soldats firent tous un pas vers l’arrière. Cette femme était plus que séduisante, elle était envoutante. D’une beauté troublante, une aura sensuelle et enivrante se dégageait d’elle malgré les cornes qui lui sortaient du front et sa peau rouge comme le sang mêlé à la terre du champ de bataille. Ses yeux dorés transperçaient l’obscurité et semblaient sonder l’âme des jeunes hommes qui cherchaient désespérément des armes pour se défendre.

-Qui es-tu démone ? demanda l’un des soldats.

Elle se mit à rire doucement. Elle leva le bras et pointa du doigt celui qui venait de la questionner. Il y eu une étincelle puis un trait de flamme alla frapper le jeune homme en plein visage. Ce dernier tomba sous la force du coup et se mit à hurler. Les flammes lui brulaient le visage. L’Ours s’élança aussitôt sur la jeune femme. Il tenta de lui assener un coup de poing en plein visage, mais elle esquiva habillement, porta une main derrière son dos et, d’un seul mouvement, elle dégaina un sabre et trancha la gorge de l’énorme soldat. Il tomba aussitôt à genoux; ses mains tentant de retenir le sang qui s’échappait de sa plaie. Il ne resta pas conscient bien longtemps.

En voyant leur compagnon, normalement si fort et craint par tous, tomber aussi facilement, les deux autres compagnons de Louis fuirent. Il ne restait donc que le nain et Louis pour faire face à cette démone.

Elle s’avança vers les 2 survivants. Quand elle arriva près de celui qu’elle avait brûlé, elle lui enfonça son sabre dans la gorge. Il mourut sur le coup.

-Je ne veux pas te tuer soldat, dit-elle en rengainant son arme. J’ai seulement besoin de vos ordres. L’un d’entre vous doit bien avoir un parchemin sur lequel est inscrite votre prochaine affectation ?
Louis était encore sous le choc de la mort de ses deux amis. Il avait réussi à tirer la dague qu’il avait cachée dans sa botte, mais face à de la magie, il ne pouvait rien faire.

-Donne lui tes ordres le jeune ! dit le nain tout aussi paniqué que le soldat. Tu vas pas laisser cette salope…

Le nain n’eut pas le temps de terminer sa phrase. Un trait enflammé vint le frapper à la poitrine. Il prit feu très rapidement vu la quantité d’alcool qu’il avait sur lui. Les cris de douleur furent vite étouffés par les flammes.

-Alors soldat ? Que vas-tu faire ? Mourir de façon stupide comme tes amis ou me remettre ce que je cherche et fuir ?

Louis laissa tomber sa dague. Il lança sa clé de chambre à la meurtrière de ses compagnons.

-Ce que tu cherches est dans nos affaires à l’auberge.

Louis ne dit rien de plus et quitta sans attendre.

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Akïna ne pensait pas que ce serait aussi facile. Habituellement, les soldats expérimentés ne perdent pas leurs moyens de la sorte. Mais bon, ils avaient bu et il faut dire que le physique de la jeune femme était un atout non négligeable dans ce genre de situation. Malgré son héritage démoniaque, elle n’avait rien en commun avec son père ou ses autres ancêtres. Elle s’empressa de prendre les bourses sur les cadavres et de vérifier si le document qu’elle cherchait ne se trouvait pas sur l’un d’eux. Rien. Elle remit sa capuche et se dirigea vers l’auberge où auraient dû dormir les soldats. Elle se fondait dans la foule sans aucun problème. Passer inaperçu était un autre de ses talents.

Quelques minutes plus tard, elle était de retour au Tonneau Fredonneur. On y faisait encore la fête. Sur scène se tenait un trio composé de deux gnomes, l’un jouant du tambour et l’autre du luth, et d’un hafelin jouant de la flute, jonglant et insultant les clients de façon très imagée. Tout le monde riait, dansait et chantait. Akïna ne s’attarda pas plus longtemps dans la salle commune et prit l’escalier menant au premier étage. Elle entra dans la chambre des soldats. Elle y trouva les achats de ces derniers. En fouillant pour trouver le document, elle trouva les couteaux à lancer qu’elle attacha à son ceinturon. Elle finit par tomber sur ce qu’elle cherchait; elle brisa le sceau de cire et se mit à lire :

''Rendez-vous au sud de la ville d'Ardyn. Les régiments d'Yvan et de Simon y ont installé leurs campements. Les survivants du clan de l'Élan se terrent dans la forêt à l'est. Les éclaireurs sont déjà sur place.
Et Louis, n'oublie pas de me ramener un tonneau de bière de Don' Mor.

Bastien.''

Il y avait donc deux régiments près de la forêt de l'est. Akïna devait faire suivre cette information au plus vite. Elle mit le parchemin dans sa besace, se releva, mais quand elle voulu sortir de la chambre, on lui bloqua le passage. Elle tomba nez à nez avec Louis, épée à la main. La tiefling repoussa rapidement sa cape et porta sa main à son sabre.

-Tient, dit-elle moqueuse, tu n'as pas eu ta leçon ? Tu veux venger tes compagnons ?

-Ta gueule sale pute ! Tu vas payer pour ce que tu as fait.

Il porta le premier coup, mais Akïna était rapide et agile. Elle dégaina son sabre et vînt bloquer la lame de Louis. Il n'attendit pas la réplique de la démone et lui donna un violent coup de pied à l'estomac. Elle fût projetée vers l'arrière. Elle alla frapper le mur entre la tête d'un des lits et une fenêtre. Elle allait contre-attaquer quand Louis pénétra dans la chambre avec quatre autres hommes armés. Elle reconnut les deux fuyards du groupe qu'elle avait suivi toute la journée. Le dernier ferma la porte derrière lui.
la tiefling avait déjà utilisé beaucoup de sa magie pour combattre et se cacher des regards inquisiteurs de Louis toute la journée. Il lui restait assez d'énergie pour lancer un seul sort, après, elle devrait combattre au corps à corps.

-D'accord, vous avez gagné. Je me rends, dit Akïna en rengainant son sabre. Elle leva les mains au ciel.

Deux des soldats s'approchèrent  afin de la maitriser, mais Louis s'écria aussitôt :

-Non, attention ! Elle peut utiliser...

La jeune femme se mit à hurler si fort que les deux soldats s'approchant d'elle s'arrêtèrent aussitôt et plaquèrent leurs mains contre leurs oreilles. Ils se mirent à crier et finirent par s'effondrer. Le cri magique d'Akïna les avait rendus sourds. Les trois autres ne durent pas autant affectés par le sort, mais tout de même ébranlés. La tiefling n'attendit pas que ses adversaires s'en remettent : elle prit deux couteaux à lancer accroché à son ceinturon et les lança vers Louis et un autre soldat. Ce dernier reçut le couteau dans la gorge tandis que Louis fît dévier le projectile avec son épée.

Il se jeta sur la démone. Elle eut le temps de reprendre son sabre et de parer les coups. Elle ne semblait pas si forte, mais elle déviait chaque coup avec tant de finesse et de précision; il ne pourrait pas la vaincre par la force.

 -Allez, qu'est-ce que tu fais ? Viens m'aider ! ordonna Louis à son compagnon se trouvant près de la porte.

Le soldat prit son courage à deux mains et se lança également dans la mêlée. Akïna réussit tant bien que mal d'éviter les coups de l'un et bloquer les autres, mais elle ne pourrait pas tenir cette cadence bien longtemps. Elle devait saisir l'occasion de s'enfuir. Louis tenta de la frapper à la tête, Akïna fit dévier le coup, agrippa le poignet de Louis et se plaça derrière lui en réalisant une clé de bras l'immobilisant. Pendant la manœuvre, l'autre soldat réussit à la blessé profondément à la cuisse. Elle répliqua sur-le-champ en frappant son assaillant au visage. Elle trancha profondément la chaire de sa joue droite.

Louis était sous le contrôle de la démone, désarmé et son compagnon était blessé, mais était toujours en état de combattre. Pour sa part, la tiefling était épuisée par les échanges de coups et la plaie sur sa cuisse qui laissait s'échapper beaucoup de sang. Elle devait agir.

-Bon assez joué mes mignons. Je dois partir.

Elle relâcha son emprise sur Louis puis lui donna un coup de pied dans le dos; ce qui  l'envoya percuter son compagnon. Akïna en profita pour courir vers la fenêtre et sauter à travers. La chute fut plus brutale qu'elle l'avait prévue. Elle tomba sur le dos, elle perdit le souffle et la plaie de sa cuisse s'ouvrit davantage. Malgré tout, elle se releva péniblement. Elle se dirigea vers les ruelles derrière l'auberge, mais une voix l'interpella :

-Où est-ce que tu crois aller comme ça salope ?

La douleur brouillait sa vision. Akïna n'avait pas vu que six soldats étaient cachés tout autour d'elle.

-Tu n'es pas chanceuse, on est plusieurs de la même compagnie en permission ce soir. Louis nous a dit que tu avais tué deux de nos gars. Et à ce que j'ai entendu, tu as peut-être déjà fait d'autres victimes. Lâche ton arme ! Si tu coopères, on va te tuer rapidement après qu'on t'est passé dessus.
Elle tenait à peine debout. Son sabre lui servait de canne. On ne l'avait pas informé que le groupe qu'elle devait suivre avait d'autres alliés dans la ville. Elle ne pouvait plus utiliser sa magie et sa jambe la faisait trop souffrir pour combattre. Si elle avait su, elle aurait pris la chance de porter une armure. Malgré tout, elle n'allait pas se laisser violer.

La pointe de son sabre quitta le sol puis se dirigea vers la gorge de celui qui venait de l'interpeller. Mais le coup fut facilement paré et la tiefling renvoyée au sol avec un coup de poing au visage. Sur le dos, elle avait perdu son arme. Étourdie par le coup et sa chute, elle cherchait son sabre en tâtonnant près d'elle, mais son agresseur posa son pied sur son poignet. Elle ne pouvait plus bouger. Elle était à bout de force; elle aurait dû prévenir les autres, mais il était trop tard.

Un autre soldat s'approcha pour tenir les bras de la jeune femme pour l'empêcher de se débattre. Elle tenta de lui résister, mais ses forces l'avaient définitivement abandonné. Celui qui l'avait envoyé au sol ne perdit pas de temps : il tira une dague de sa ceinture et coupa les lacets de la tunique d'Akïna.

Elle voulut crier, mais la dague apparue remonta à sa gorge. Elle était maintenant complètement nue. Le soldat commença à la caresser violemment. Elle entendait les compagnons de son agresseur l'encourager. Des larmes coulèrent de ses yeux; c'était la première fois de sa vie qu'elle était si impuissante, qu'elle avait peur.

-Allez, t'as bientôt fini ?!? s'impatienta un des soldats. Nous aussi on veut en profiter.

L'agresseur se mit à rire. Il se releva, défi sa ceinture et baissa son pantalon. Il écarta les cuisses de la tiefling, se pencha, mais s'arrêta quand il entendit des cris derrière lui. Il se retourna aussitôt et vit un de ses compagnons sortir de l'ombre de la ruelle en vol plané. Ils se rendirent vite compte qu'il était mort. Son armure avait été défoncée par un énorme objet contondant. Tous observaient la ruelle avec attention. Leurs armes à la main, ils n'osaient pas trop s'approcher de l'ombre.

-Bande de sales pourceaux. C'est facile d'attaquer quelqu'un de blessé à six ! Mais quand il faut réellement défendre vos vies...

La personne qui venait de parler sortit de la ruelle. À ce moment-là, les soldats comprirent pourquoi leur compagnon était mort. Devant eux se tenait un demi-orc mesurant près de sept pieds. D'une carrure impressionnante, il portait une armure composée d'un plastron d'acier ainsi que des protections de fourrure pour les épaules, les avant-bras et les tibias.  Vu cette allure, ce guerrier devait provenir d'une des tribus du nord. Les soldats remarquèrent surtout l'arme du guerrier : un énorme marteau de guerre à deux mains. Voilà ce qui avait servi à tuer leur compagnon.

-Allez vous autres ! Tuez cette ordure, vengez notre camarade ! cria l'agresseur d'Akïna. Il remontait son pantalon et s'empara de sa lame.

-C'est ça, venez ! hurla le demi-orc qui se mit à courir vers le groupe de soldats.
Les deux premiers qui croisèrent le barbare n'eurent pas le temps de réagir. L'immense marteau s'abattit sur le premier soldat; l'impact le projeta sur son compagnon. Les deux étaient morts avant de toucher le sol. Un autre soldat profita de l'ouverture dans la défense du demi-orc pour le frapper au flanc gauche. Il réussit à le blesser, mais la blessure n'était pas assez importante ni assez douloureuse pour arrêter ce monstre. Ce dernier pivota et frappa son assaillant en plein visage avec le manche de son arme. Ainsi, il décrocha la mâchoire du soldat qui se mit à hurler de douleur. Sa souffrance disparue aussitôt que le barbare lui écrasa la tête avec l'autre bout du marteau.

Après ce coup, le demi-orc se remit à hurler de rage. Les trois soldats restants lui tournèrent le dos pour s'enfuir. Mais il était plus rapide qu'eux. Il les rattrapa facilement. Le premier qu'il put atteindre eut les jambes brisées. La force du coup le projeta sur l'un des murs de la ruelle. Le deuxième trébucha et fut tout simplement piétiné par le colosse. L'agresseur d'Akïna allait sortir de la ruelle lorsque le cri du barbare retentit derrière lui; le tout annonçant que le marteau allait de nouveau frapper.

Il reçut le coup au côté droit. L'impact cassa son bras à de multiples endroits ainsi que plusieurs côtes. Il se retrouvera à son tour sur l'un des murs de la ruelle. En atterrissant sur le mur, sa tête heurta violemment la paroi et du sang vînt voiler sa vision. Il ne voyait plus rien et la douleur troublait ses autres sens. Il paniquait. Il sentit le colosse s'approcher tranquillement. Il sut que son ennemi était devant lui lorsqu'il sentit son haleine empestant l'alcool.

-Toi, tu ne vas pas mourir...pas tout de suite.

La voix de demi-orc semblait venir de si loin.

Le soldat essaya de se relever malgré la douleur, mais une énorme main le ramena aussitôt au sol. Il entendit le son d'une lame qu'on dégaine de son fourreau. Il redoubla d'effort pour se lever, mais rien à faire.

-Si tu survis, tu ne feras plus de bâtard.

Le guerrier plongea la lame de sa dague dans l'entrejambe du soldat qui se mit à hurler. Il tenta de repousser le bras du colosse, mais avec un seul bras et ses autres blessures, il ne pouvait rien faire.
Le demi-orc retira sa dague, l'essuya sur sa victime et rengaina.

-Achève-moi. TUE-MOI ! hurla le soldat.

Le barbare se contenta de cracher sur celui qui le suppliait.

Akïna, qui s'était recouverte de sa cape, était impressionnée par tant de force, mais ne voulait pas que cette bête s'approche d'elle. Pendant que le barbare se dirigeait vers la ruelle, elle avait récupéré son sabre.

-Ne t'approche pas !

Le guerrier, qui s’était retourné vers elle, se mit à rire.

-Tu crois que tu peux m'arrêter dans ton état ? Baisse ton arme, j'te veux pas de mal. Si c'était le cas, tu serais déjà morte.

Malgré l'apparente gentillesse du guerrier, elle garda son sabre pointé vers lui.

-Bon allez, j'ai pas toute la nuit !

Il s'approcha de la tiefling qui n'eut pas le temps de réagir. Il la désarma puis prit la jeune femme pour la mettre sur son épaule. Il ramassa le sabre, le mit à sa ceinture et reprit son marteau.

-Maintenant, tais-toi. Je ne veux pas qu'on tombe sur la garde et toi non plus j'crois bien. Je vais t'amener voir un ami qui va pouvoir s'occuper de ta blessure.
Akïna ne pouvait plus rien faire. Elle décida d'économiser le peu de force qui lui restait pour la suite de la nuit.