mardi 27 mai 2014

Vieillir (31)

Je viens d'avoir 31 ans. L'an dernier, j'entrais dans la trentaine et je me disais que bien des choses allaient changer. J'avais raison.

Depuis deux ans, je me disais que je ne voudrais pas d'une vie de couple avant un bon bout, mais finalement tout ça me manque. La tendresse et le partage, la sensualité et l'intimité, la générosité et l'écoute...tout ça pour une femme qui donne le goût à tout. En deux ans, je croyais avoir rencontré cette femme à quelques occasions, mais non. Rien de grave, vaut mieux attendre que se réfugier avec la mauvaise personne...pour les mauvaises raisons.

Ma tête n'arrête jamais. Je me suis posé tellement de questions dans la dernière année et j'ai réalisé bien des choses.

Il y a des épreuves que je ne veux pas vivre. Je pense aux enfants. J'aimerais être papa, mais j'ai peur. Comme tous les hommes, j'imagine. Mais je ne veux pas être un mauvais père, oublier d'offrir tout ce que j'ai de bon à mes enfants et ne leur montrer que mes mauvais côtés. J'ai peur qu'ils partent, qu'ils me manquent. J'ai peur qu'ils meurent. Je ne sais pas comment je vivrais si je survivais à mes enfants. Le tout est hypothétique, mais tout devient réel quand je converse avec mon imagination qui se dit devin. En même temps, il faut se lancer quand c'est possible, il faut toujours espérer et faire de son mieux. J'ai plus de courage que je pense.

Je vieillis pour vrai. On a beau dire que 30 ans c'est encore jeune, mais ce n'est plus mes 20 ans. Tout change et c'est normal. Je dois accepter tout ça. Les partys sont plus amers, les réveils de plus en plus difficiles et la poésie plus violente. Les amateurs de clichés me diront ''c'est la vie'' et ils ont bien raison. Mais j'ai quand même décidé de ne pas suivre ce chemin. Mon père m'a toujours dit que j'étais indépendant et que je faisais à ma tête.

Je me demande à 31 ans pourquoi je ne veux pas conduire. Ça serait bien pratique à l'occasion et tout, mais ça ne m'intéresse pas. J'ai déjà utilisé une auto comme ça dans mon village, mais rien de sérieux. Mais au fond j'ai peur, peur de ne pas être assez bon, d'être maladroit, d'être dangereux. Statistiquement, je sais que ce genre de réflexion est ridicule, mais ça se promène toujours dans ma tête. Encore une fois, peut-être trop de questions.

Je veux être génial, je veux être sans faille, je veux être mémorable. C'est difficile à porter, surtout quand on n’est rien de tout ça. Encore une fois, rien de grave...mais quand même. Tout ce que j'écris devrait être parfait, tout ce que je dis devrait être intelligent, tout ce que je suis devrait me plaire...mais je me déçois. Je travaille pour être réaliste et pour m'améliorer. Bien des gens ne comprendront pas pourquoi je suis comme ça, mais au fond on est pleinement conscient d'une faiblesse seulement quand elle devient nôtre.

C'est de calme dont j'ai réellement besoin. Il faut que ma tête se taise et me laisse vivre ce que je suis. La sérénité me manque plus que tout. Je n'ai besoin que de quelques moments de vraie quiétude pour me laisser aller, me laisser parler et arrêter de me rendre malade à force de trop penser. 


''Mon coeur préfère la vie d'oiseau.'' -Dédé Fortin






mardi 13 mai 2014

La tempête

Je me dis souvent que je devrais arrêter de voir des gens. Aller à la rencontre des autres ça fait mal. Même si je ne peux pas me passer de ceux que j'aime, le fait de revenir à ma solitude par la suite, ça me tue. 

Tous les soirs, je me dis que tout va bien, que je l'ai bien apprivoisé, mais il y a toujours un moment où tout se fige, tout me rappelle l'avant-combat. Après ça, je m'acharne à combler un vide qui ne peut l'être. Je m'occupe comme je peux, mais rien ne fait.

Ce qui m'effraie le plus, c'est que plus rien n'a de sens à ce moment-là. Je ne me reconnais plus, rien n'est en ordre dans ma tête; c'est étourdissant. Que des souvenirs rageurs ou des attentes insupportables pour me tenir compagnie. Qu'une tempête sans réel nom ni visage, que du vent. Je suis perdu et je m'en rends compte.

Ça fait mal. Même si j'en parle, si le monde entier peut comprendre ce qui se passe, j'ai mal. Je sais à l'avance que chaque repas, verre ou discussion en compagnie d'autres ne seront que passager et que je suis condamné à rien d'autre qu'à une attente amère. 

Tranquillement, tout finit par se calmer. Je raisonne avec moi-même. Rien n'est parfait, mais au moins je me mets soudainement à comprendre que c'est la vie. Je délaisse le fatalisme pour la logique, mais je sais que ça ne durera pas. Une nuit trop froide ou une soirée trop intense me ramènera toujours à cette tempête qui hurle. Plus que du vent finalement.

À chaque dérive, la fin semble proche,pourtant tout tient bon. Je perds un peu de moi à chaque retour, c'est autre chose qui s'acharne à revenir. Je devrais m'habituer à dire au revoir. Ce serait plus prudent, car le pire au revoir est celui qui doit se prononcer adieu.

mercredi 7 mai 2014

Abandonner

On dirait que j'ai abandonné. Je pensais sincèrement arriver à quelque chose, mais finalement je n'ai rien. Au bout d'un certain temps, on s'épuise à attendre. C'est ce qui se passe.

Il y a des attentes plus douces que d'autres. En se racontant des histoires ont peut faire bien des choses. Mais à se raconter les mêmes histoires trop souvent, elles deviennent de faux espoirs qui meublent des secondes qui disparaissent en gémissant.

Il suffit de quelques gestes pour se perdre, pour retomber dans le piège. Ensuite, on se fait la morale, on se dit : ''il faut vraiment être idiot pour croire encore à tout cela.'' C'est à ce moment précis qu'on se vide de ses forces vives, de son estime, de sa matière. On devient sans substance. 

Il y en aura toujours pour dire le contraire, mais ce n'est ce que l'on ressent, ce n'est pas ce message que le monde envoie. Au-delà du contexte et des gens, il me sera impossible de voir autre chose que ma vérité. 

Se sentir de trop partout, voilà ce qui suivra. Jamais de place, que de timides invitations sans réel désir que l'on soit présent. Ne jamais se sentir le bienvenu. Pourtant on aime, on rit, on chante, on danse avec tous comme le font les autres. On dirait bien que notre amour n'est pas assez vrai, que l'on rit trop fort, que l'on chante faux et que nos pas sont plus maladroits. 

J'aimerais pouvoir écrire que je préfère tout cela à un monde plus facile, plus beau mais artificiel...mais non. Parce que tout le monde arrive à sa limite, parce que tout le monde finit par abandonner.

''J’aurais tant voulu être à ta place. Pour pouvoir comme toi être aussi beau. J’aurais tant voulu être à ta place. Pour oublier les vertiges d’en haut.''

-Pierre Lapointe